Les amis je ne peux commencer qu’en nous souhaitant à toutes et tous une année 2021 un peu plus réjouissante que celle qui vient de s’achever; beaucoup pensent que cela ne sera pas bien difficile mais attendons quand même de voir ce qui va bien encore pouvoir sortir du chapeau.
Alors c’est vrai que l’actualité est riche ces dernières semaines: un vaccin qu’on nous annonçait hier encore pour dans 10 ans, un accord sur le Brexit arraché par celui qu’on ne résumait de façon très arrogante qu’à sa coupe de cheveu, une Amérique au bord de l’implosion qu’il est urgent de rassembler mais où l’on joue à celui qui jettera le plus de l’huile sur le feu. Au passage je trouve très inquiétant ce virage pris par les Facebook et autre Tweeter qui s’arrogent le droit de décider ce qui est bien et ce qui est mal, qui peut s’exprimer et qui doit être muselé.
Et puis chez nous un couvre-feu généralisé dès 18h (pour contrer l’effet apéro comme l’a une fois de plus maladroitement précisé l’exécutif) et qui va concentrer encore plus l’occupation dans l’espace public. Sans oublier ce un pan de nos vies que sont la culture, les cafés, les restaurants… gauchement (j’arrive au bout des synonymes) jugés “non essentiels” et qui sont maintenus à l’arrêt sur les conseils de scientifiques qui ont montré au passage qu’ils n’avaient rien à envier aux politiques en matière de violences verbales et de guéguerres intestines.
Vous avez vu le virus s’exporte à l’international, on a la version anglaise qu’on imagine sournoise et déterminée, jouissant d’une parfaite maitrise du second degré, la mystérieuse version sud-africaine qu’on devine ancestrale et mystique, et la version brésilienne carnaval et samba qui vient gâcher un peu l’ambiance anxiogène chère aux chaines infos.
Alors on s’insurge dans les médias du scepticisme ambiant concernant la vaccination, en plus au pays de Pasteur. Les communicants de l’exécutif ont même banni le mot “vaccinodromes”, pas très vendeur, au profit de “centres de vaccination“, voire de “club med’ vaccin” si ça peut convaincre les irréductibles. Le pays de Pasteur est aussi celui des lumières, celui de Descartes et de son cogito, et c’est vrai qu’ici plus qu’ailleurs le doute est institutionnalisé, qu’on a tendance à privilégier la démonstration à la pilule cathodique, 66 millions de procureurs parait’il… .Cela dit en le rendant si difficile à obtenir ils vont finir par le rendre sexy à leur insu le vaccin, fuis-moi je te suis…
Sans le sous-estimer, ce n’est pas tant le virus qui me questionne mais plus ces libertés qu’on laisse filer, avec en plus un parfum “Stockholm syndrom” où certains, sous la pression médiatique, réclament plus de confinement, plus de couvre-feu, plus de restrictions… Il faut vraiment rester vigilant et ne pas trop sacrifier à la sécurité, sinon on finira par accoucher d’un état totalitaire; heureusement il a neigé…
Allez j’arrête de digresser, et en cette fin de weekend que la neige est venue égayer on en vient à enfin notre sujet du jour. Comme tous les lieux de cultures restent fermés je vous amène cette semaine dans l’est de la ville, dans un lieu qui lui reste accessible, je vous amène dans le 20ème arrondissement de Paris découvrir l’un des plus illustres cimetière au monde: le célèbre Père Lachaise.
Dans les allées du Père Lachaise
Le cimetière a été le théâtre de l’épilogue d’une période sanglante et méconnue de notre histoire: la Commune de Paris. Ambiance “sur les traces de Louise Michel” c’est parti…
Le Père Lachaise
Les amis nous nous nous promenions lors du dernier article dans l’écrin versaillais de Louis XIV; et bien figurez-vous que le Roi Soleil avait un confesseur attitré qui l’a suivi pendant plus de trente ans. Ce confesseur avait sa résidence dans une communauté Jésuite installée sur une colline un peu à l’écart de la ville. Ce théologien, c’était François d’Aix de La Chaize, aka le Père Lachaise pour les intimes.
Alors il faut se rappeler que depuis le Moyen-Age le seul cimetière de la ville, le cimetière des Innocents situé dans le quartier des halles, est un lieu lugubre et insalubre qui tient plus du charnier à ciel ouvert. Fréquenté par toute une faune la journée, véritable coupe gorge à la nuit tombée, le cimetière est saturé à cause des épidémies (dont il a dû être parfois lui-même la cause) et les ossements sont mêmes extraits des fosses communes et entassés dans des murs, jusqu’à ce qu’en 1780 tout ne finisse par s’effondrer et déborder dans les rues voisines, ça a dû être un moment d’une délicatesse extrême.
Il a alors bien fallu se résoudre à vider le lieu et à le fermer, et lorsque Napoléon lance la construction de plusieurs cimetières en dehors de la ville pour donner à chacun une sépulture décente on repense à cette colline où avait vécu le populaire Père de La Chaize: le cimetière du Grand Est, surnommé le Père Lachaise, était né.
Toujours en activité, le Père Lachaise offre une escapade au calme, culturelle… …et poétique
Dessiné par l’architecte Brogniart (pour ceux dont on avait éteint le flambeau, et la décision est irrévocable…) le cimetière est d’abord un échec cuisant; cher et mal situé il est sévèrement boudé par les parisiens. Le marketing va alors phosphorer et trouver “the” idée géniale pour booster les ventes : transférer au Père Lachaise les restes de deux idoles, La Fontaine et Molière, qui vont être inhumés côte à côte. Le succès est immédiat, et tout le monde souhaite désormais sa concession au cimetière du Grand Est, a star is born…
Aujourd’hui parmi ses 70000 concessions sur plus de 40 hectares, le Père Lachaise héberge des centaines de célébrités. Vous pouvez facilement trouver la liste mais elle est tellement fournie que je vous recommande plutôt de télécharger et d’imprimer ce plan lorsque vous irez le visiter.
Le temp filant plus vite sous couvre feu je n’ai pas eu le temps de saluer Balzac, Pissaro et Delacroix que j’apprécie particulièrement. Par contre je ne pouvais pas rater la tombe du journaliste Victor Noir dont le gisant “avantageux” rend les femmes qui s’y frottent fertiles selon la légende.
Triste nouvelle, l’excellent Jean-Pierre Bacri qui vient de nous quitter ira peut-être grossir la liste des illustres pensionnaires du Père Lachaise. Je ne sais pas vous, mais si “Mes meilleurs copains“, “Un air de famille” ou encore “Cuisine et dépendances” sont cultes, pour moi “Le gout des autres” est un chef d’œuvre absolu. D’ailleurs France 2 le passe en ce moment même en hommage à l’artiste, magnifique film…
Le Mur des Fédérés
Bon on ne va pas s’étendre sur la Commune de Paris aujourd’hui, nous y reviendrons quand nous irons balader dans le quartier de la Butte-Aux-Cailles qui s’est approprié ce passage sombre de notre histoire. Mais il faut savoir que le Père Lachaise a quand même été le théâtre final de la Commune, allez on remonte la pendule de 15O ans.
On est en 1870 en plein Second Empire sous Napoléon III, Napoléon le Petit comme le surnomme Victor Hugo en comparaison avec son illustre tonton. Allez savoir pourquoi, alors que tout va bien pour lui, Napoléon III décide de déclarer la guerre en tongs à une Prusse surarmée et qui n’attend qu’un bon conflit pour unifier l’Allemagne. La guerre est déclarée mi-juillet, le 1er Septembre l’armée française est déjà en déroute, Napoléon III est fait prisonnier à la bataille de Sedan. Bon débarras, le 4 Septembre la foule chasse de Paris les derniers partisans de l’Empire et déclare la République, mais la guerre est toujours là et Paris se retrouve durement assiégée par les Prussiens. Pendant que l’Empire Allemand est déclaré dans la Galerie des Glaces du Château de Versailles, Paris fait face la famine, la tension monte.
Un nouveau gouvernement majoritairement monarchiste, avec à sa tête Adolphe Thiers, est élu pour négocier la paix avec Bismarck. C’en est trop pour le peuple parisien qui se révolte et envoie tout ce beau monde se réfugier à Versailles. Thiers se dit qu’il serait bon de désarmer la ville avant que ça tourne au vinaigre, surtout que le traité de paix stipule que les Prussiens doivent défiler dans Paris pour célébrer leur victoire. Thiers envoie une troupe récupérer en douce pendant la nuit les canons que les insurgés ont rapatriés sur la butte Montmartre, mais on imagine bien qu’on ne peut pas déménager plus de deux cent canons sans attirer l’attention, la ville va se refermer sur les soldats de Thiers…
Sous la pression des quartiers populaires, Paris ne va plus reconnaitre le gouvernement et mettre en place en Janvier 1871 La Commune, un système politique expérimental dirigé par des commissions dont les chefs son élus. Thiers ne peut pas laisser faire et la blague va vite tourner à la guerre civile entre les versaillais (le surnom de l’armée loyaliste à la solde du gouvernement) et les parisiens dont beaucoup appartiennent à la Garde Nationale, une sorte d’armée de réserve, et tout ça sous les yeux des allemands médusés.
Parmi les grandes figures de la Commune on retrouve l’institutrice Louise Michel qui, lorsqu’elle n’échange pas des balles avec les versaillais, anime l’un des nombreux clubs de réflexion politique où les communards aiment se réunir et échanger.
Mais l’histoire ne pouvait que mal finir; face une armée de métier les parisiens n’ont pas l’expérience militaire requise, et après avoir vaillamment résisté ils vont laisser une brèche dans leur système de défense par laquelle les versaillais vont s’engouffrer le 21 Mai .
Pendant ce qui restera la “semaine sanglante” la ville va littéralement bruler, la bataille est acharnée, on défend chaque rue, chaque barricade. Les combats se finiront le 28 Mai entre les tombes du Père Lachaise où les derniers communards se sont retranchés. Les survivants seront fusillés contre un mur du cimetière, mur qui sera baptisé le mur des fédérés.
La Commune aura duré 72 jours et aura fait pas loin de 30000 morts.
Beaucoup de communards sont enterrés près du Mur des Fédérés
Et voilà les amis, si vous cherchez une balade poétique au vert, au calme et dans l’Histoire, vous pouvez allez arpenter, avec un plan dans la poche, les allées du Père Lachaise qui reste ouvert quand l’immense majorité des lieux de culture voient toujours leur porte fermée.
Bonne soirée
N.