Chinon et L’Islette

Pour profiter de ce bel été, je vous propose de délaisser un peu la région parisienne et de partir retrouver la belle vallée de la Loire pour un weekend au vert et sous le signe du patrimoine. Une escapade aussi dans l’histoire, où nous irons marcher dans les pas de trois grandes figures féminines que sont Camille Claudel, Jeanne d’Arc et la reine punk, la magnifique Aliénor d’Aquitaine.

Allez, on saute dans sa voiture on file au sud-est de Paris rejoindre la vallée des rois.

La Vallée des Rois

Il faut environ deux heures pour rejoindre la vallée de la Loire dans sa partie la plus historique, à mon sens entre Blois et Angers. L’endroit où poser vos valises va beaucoup dépendre des visites que vous avez mises au programme.

Pour une première incursion je recommande Tours qui est à la fois animée et idéalement située pour se projeter partout. Nous y étions vendredi dernier et le centre historique était comme toujours bouillonnant, pas facile en début de soirée de trouver une place où se poser en terrasse.

Pour ma part j’ai tendance généralement à pousser un peu plus loin jusqu’à Chinon, une jolie petite ville médiévale en bord de Vienne que j’ai découverte il y a quelques années lors de ma première Loire à vélo.

Sur le chemin de Chinon nous nous sommes arrêtés visiter Ussé, un château « contes de fées » que nous découvrirons à une autre occasion (il faut que je garde un peu de stock pour les périodes de disette).

Chinon la rabelaisienne

Accrochée à son promontoire rocheux qui surplombe la Vienne, Chinon est une petite ville connue essentiellement pour son vin et son prestigieux patrimoine historique.

C’est surtout une ville super agréable pour poser son sac et partir explorer la contrée.

Il n’est pas difficile de trouver un chouette hébergement à un prix raisonnable, je peux conseiller la maison d’hôtes les Destinées, ou encore l’hôtel Agnès Sorel qui donne directement sur la Vienne.

Alors ne faites pas la même erreur que moi en demandant à la patronne si c’est elle Agnès, Agnès Sorel était la favorite (ie la maitresse) du roi Charles VII installé à l’époque juste au-dessus dans la forteresse.

C’est un personnage de l’ombre mais qui a beaucoup influencé la politique du roi. L’histoire raconte qu’elle était complètement extravagante est qu’elle a éclipsé la reine grâce à ses tenues avant-gardistes. Agnès Sorel va incuber une nouvelle mode auprès d’une cour royale austère avec ses coiffures déjantées, ses interminables traines, et surtout ses épaules nues et ses décolletées plongeants. Un véritable scandale pour l’époque.

Un centre historique médiéval

Les ruelles étroites et pavées de la vieille ville montent en pente, pas toujours douce, vers la forteresse qui surplombe tout le bourg et que nous irons visiter plus tard.

La déambulation est plutôt agréable, entre vieilles pierres, hôtels particuliers et anciennes maisons à pan de bois.

Chinon n’est pas la ville de Rabelais pour rien, c’est une place forte du vin et de la bonne chère, aussi on trouve de nombreux établissements où se poser pour un verre ou pour déjeuner. Mais si vous voulez avoir le choix, ne tardez pas trop à vous décider…

Samedi toutes les bonnes tables ont vite affiché complet, en en pleine canicule nous nous sommes finalement retrouvés chez un spécialiste des… raclettes, fondues et autres pierrades. Heureusement le lieu proposait autre chose, et au final nous avons passé un excellent moment.

La sympathique serveuse, étudiante en médecine, essayait de tout retenir de tête et était très déçue lorsque d’aventure elle se trompait. Au point qu’on avait presque envie de récupérer le plat du voisin juste pour lui faire plaisir.

La Guinguette

Mon véritable coup de cœur à Chinon reste la petite guinguette qui s’étend de l’autre côté de la Vienne, et qui permet de prendre un verre ou une planche apéral en regardant le coucher de soleil sur la vieille ville.

Nous n’avons pas eu le temps d’y passer ce week-end du 15 aout, les photos datent de mon précédent passage. D’après la serveuse (mais qui n’y est toujours pas allée non plus) la guinguette est encore mieux que l’an dernier.

Si vous passez dans le coin en fin d’aprèm, n’hésitez pas à vous y poser et regarder le temps s’écouler au fil de la Vienne.

Allez on va laisser un peu Chinon pour aller découvrir le château de l’Islette.

Le Château de l’Islette

Direction la petite commune d’Azay-le-Rideau qui se trouve à une vingtaine de minutes en direction de Tours. Le château d’Azay le Rideau fait partie des blockbusters, avec les Chambord, Cheverny et autre Chenonceau, mais ce n’est pas notre destination du jour.

En effet, à moins de deux kilomètres on peut trouver une autre bâtisse, construite par les mêmes ouvriers mais beaucoup plus confidentielle : le château de l’Islette.

La première chose qui saute aux yeux lorsqu’on franchit le vieux portail, c’est qu’ici il n’y a pas de bus déversant des flots de visiteurs, pas de stress, pas de bruit… vous vous retrouvez quasi seuls dans le magnifique domaine qui s’offre à vous.

Sur les bords de l’Indre

Cachées entre les arbres et peu visible de la route, le château de l’Islette s’étend au bord de l’Indre. D’origine médiévale, mais construit vers 1530 sous sa forme Renaissance actuelle en même temps que le voisin d’Azay-le-Rideau, le château doit son nom au fait qu’il est quasi entouré par la rivière.

Le domaine est passé entre plusieurs mains sous l’ancien régime, mais il n’a subi que peu de transformations et reste donc en très bon état. Il appartient aujourd’hui à des descendants d’une des anciennes familles propriétaire, et qui y vivent.

Le lieu est ouvert à la visite depuis moins de quinze ans.

Des intérieurs chargés

Comme le lieu est habité et ouvert à la visite juste quelques mois autour de l’été, la décoration est un mélange assez inhabituel de style Renaissance et de moderne.

Le point d’orgue de la visite est la Grande Salle qui se trouve à l’étage. Une salle Renaissance dominée par une immense cheminée, et qui a sans doute servie d’atelier à Rodin et Camille Claudel. Si vous souhaitez approfondir, des visites guidées partent régulièrement depuis le jardin.

Entre deux meubles d’époque on trouve une cuisine équipée ou encore une salle de bain « boule à facettes », le château est effectivement habité toute l’année. Nous avons d’ailleurs croisé les proprios qui nous ont lancé un grand sourire, visiblement pas fâchés de partager un peu leur écrin.

Auguste Rodin et Camille Claude

Mais ce qui fait surtout l’originalité de ce château, c’est qu’il a abrité les amours passionnés, passionnels, tumultueux… du sculpteur Auguste Rodin et de sa talentueuse élève puis assistante, Camille Claudel.

Amis du chatelain, le couple vient régulièrement l’été pour des retraites créatives, mais surtout pour vivre leur relation loin du quotidien parisien et des regards indiscrets.

Il est vrai que le romantisme et charme bucolique des lieux poussent plus à roucouler qu’à bosser.

L’histoire finira mal, Camille Claudel en conflit avec Rodin va sombrer dans la paranoïa et sera internée pendant trente ans dans un asile psychiatrique, jusqu’à sa mort en 1843. Nous reviendrons plus en détail sur cette histoire d’amour à la fois belle et sordide lorsque nous irons visiter l’atelier de Rodin dans la forêt de Meudon.

N’hésitez pas à aller saluer cet écrin lors de votre prochaine dans la vallée de la Loire. Allez on repart pour Chinon visiter la forteresse.

La Forteresse de Chinon

Du haut de son éperon rocheux, la forteresse de Chinon surplombe la vieille ville, et au-delà domine toute la vallée. Depuis l’antiquité, la forteresse a vu passer nombre de personnages incontournables de l‘histoire de France, nous allons nous arrêter sur deux : Aliénor d’Aquitaine et Jeanne d’Arc.

ALiénor, la Reine Punk

Personnage fascinant, à quinze ans Aliénor est duchesse d’Aquitaine, elle administre un territoire qui couvre tout l’ouest de la France, ce qui en fait un excellent parti. Elle épouse en 1137 le Roi de France, mais ayant été élevée dans la tradition grecque baignée des arts, des plaisirs, de la culture et du divertissement, elle s’ennuie très vite à la cour très austère de son « moine » de roi.

Ambitieuse, cultivée, elle va vite mettre la révolution à la cour en enchainant les scandales, jusqu’à ce que le pieu roi Louis VII, qui n’arrive pas à gérer cette reine punk, n’en puisse plus et ne demande l’annulation du mariage; une première pour l’église et le pape.

Fraichement célibataire, la belle tape dans l’œil du jeune Henri Plantagenet qui va devenir roi d’Angleterre, propulsant Aliénor de reine de France à reine d’Angleterre. Elle ramène au fraichement couronné Henri II ses terres d’aquitaine, dont cette belle forteresse de Chinon où le couple se rendra régulièrement.

La belle va mener une vie d’aventurière au coté (mais le plus souvent contre) son roi, avec qui elle aura de nombreux enfants dont son chouchou, le légendaire Richard « Cœur de Lion », qui apparait souvent dans la culture pop british (Ivanhoé, Robin des Bois… ).

J’ai écrit il y a quelques années un long article sur Aliénor, je mettrai le lien à la fin.

jeanne d’Arc, la Pucelle d’Orleans

Trois siècles après Aliénor. Nous sommes en 1429 en pleine Guerre de Cent Ans, l’anglois est partout et le royaume de France est quasiment réduit à la ville de Chinon où le dauphin Charles VII s’est réfugié.

Tout espoir semble perdu lorsque une jeune paysanne, habillée en homme et qui a fait le voyage depuis la Lorraine, toque à la porte. Elle dit avoir reçu une mission divine : conduire Charles VII au sacre à Reims et libérer la France.

Intrigué, Charles place un figurant sur le trône et se cache parmi les membres de la cour. La légende raconte que Jeanne ignore la personne sur le trône et vient directement trouver le roi dans la grande salle (pourtant pas d’Insta ou de Facebook à l’époque).

On ne sait pas ce que Jeanne va bien pouvoir raconter, mais elle va convaincre le dauphin et ses conseillers de lui confier une armée. On connait la suite, Jeanne va faire sauter les verrous britishs sur la Loire et va lever le siège d’Orleans.

C’est la remontada, les armées françaises écrasent les anglois lors de plusieurs batailles décisives, et le 17 juillet 1429 Charles est sacré roi de France dans la cathédrale de Reims.

Chambre avec vue

Que vous soyez fan d’histoire ou pas, la forteresse offre une visite agréable, avec partout des vues à 360 sur la vallée.

La vue depuis la tour de l’Horloge, là encore on ne croule pas sous le nombre de visiteurs

La visite s’adresse aux petits comme aux grands, vous pouvez récupérer à l’entrée des tablettes qui vous font voyager dans le temps. Comme elles sont encombrantes, n’hésitez pas à encourager ceux qui vous accompagnent à en prendre pour pouvoir en profiter (private joke)

On en reste là avec cette forteresse que je vous encourage à aller visiter si vous passez dans les parages.

Agnès Sorel, Aliénor d’Aquitaine, Camille Claudel, Jeanne d’Arc… quatre femmes qui ont marqué l‘histoire de France. Les amis, si j’obtiens le prix Femina et que je deviens riche et célèbre, je ne garantis pas que je continuerai à vous fréquenter, ni même à répondre à vos sollicitations, mais je vous resterai quelque part dévoué à jamais.

Il est temps de rentrer sur Paris, j’espère vous avoir donné envie d’aller découvrir Chinon et de partir explorer les confins de l’Anjou, du Poitou et de la Touraine. Comme promis plus haut, quelques liens :

• Chambres d’hôtes les Destinées
• Hotel Agnes Sorel

• Château de l’Islette
• Forteresse de Chinon
• Aliénor d’Aquitaine – Balades de Nico

A suivre, un endroit proche de Paris aussi confidentiel qu’onirique, et une escapade aux confins de l’Europe, à la croisée des civilisations.

Bonne fin de weekend

N.