Cette semaine on oublie la rentrée, son lot d’hystérisations politico-médiatiques, et nous prolongeons l’été en partant pour un grand voyage, non pas à plusieurs heures de vol mais à quelques stations de métro du centre de Paris.
Une escapade mystique dans le quartier indien au nord de la ville, où l’on fête aujourd’hui Ganesh le dieu à tête d’éléphant, peut-être la divinité la plus vénérée du panthéon hindou.
Les amis nous voilà partis pour une expérience un peu psychédélique, l’explosion des couleurs du tourbillon des saris baignés dans les effluves d’encens et des épices.
Little India
Comme toute grande ville qui se respecte, Paris possède ses quartiers ethniques. Si on connait bien le secteur japonais autour de la rue Saint-Anne ou encore le triangle asiatique au cœur du 13ème, on est moins familier avec ce quartier indien qui s’étend entre la Gare du Nord et le métro Chapelle.
Alors si on veut être vraiment puristes on parlera plutôt d’un quartier tamoul, une des nombreuses composantes du peuple indien que l’on trouve au sud de l’Inde et au Sri Lanka.
Au Sri Lanka, des tensions entre les cingalais bouddhistes au pouvoir et les séparatistes tamouls, tensions sans doute un peu attisées par les anglais qui aiment bien mettre un peu le bordel quand ils décolonisent (le Sri Lanka aka Ceylan était sous domination anglaise jusqu’au milieu du 20ème siècle), vont tourner à la guerre civile et au massacre au début des années 80.
Les différentes guerres entre les tigres tamouls et le gouvernement vont durer presque trente ans, beaucoup de civils vont fuir les massacres et partir vivre en Inde ou en occident. Sur Paris il a bien a fallu se loger, et les réfugiés tamouls vont investir ce quartier un peu à l’abandon entre Chapelle et la Gare du Nord, le long de la rue du Faubourg Saint-Denis : Little India est née.
Aujourd’hui Little India c’est l’assurance d’un dépaysement total. Vous y trouverez tout ce qui tourne autour de la culture indienne, des magasins d’étoffes aux épiceries spécialisées, en passant par les pâtisseries, les restaurants, le tout Bollywood (Kollywood pour les films en Tamoul me précise Mlle Dodo ma sympathique accompagnatrice), les bijouteries, sans oublier les boutiques ayurvédiques…
Allez il est temps maintenant de partir s’immerger avec la communauté hindoue pour participer à la fête du dieu éléphant.
La Fête de Ganesh
Dimanche 27 aout, nous arrivons assez tôt dans le quartier indien qui s’étire entre Chapelle et Gare du Nord. Les commerçants peaufinent leurs stands et empilent les noix de coco qui seront brisées au passage des chars. Des enceintes diffusent de la musique indienne plutôt entrainante, même si mon accompagnatrice, qui a baigné dans une culture plutôt originaire du nord de l’Inde, m’assure que chez elle c’est complètement différent.
Des associations distribuent thé, friandises et verres de lait parfumés à la rose. Partout on dresse des autels avec des offrandes car Ganesh est un dieu gourmand qui adore les douceurs.
Ganesh, le dieu Elephant
J’ai essayé de gratter un peu du côté de l’histoire de Ganesh et j’ai trouvé beaucoup de versions dont certaines diffèrent totalement. Dans certaines c’est Shiva qui, en colère, a décapité le fils de son épouse, dans d’autres c’est le dieu Vishnou, et dans toutes il y a cet éléphanteau qui passe malencontreusement par là et dont la tête va se retrouver sur le corps du petit garçon ressuscité.
Ganesh est le dieu de la sagesse, de l’intelligence et de plein d’autres choses; c’est aussi celui qui supprime les obstacles dans la vie, ce qui peut expliquer qu’il est sans doute la divinité la plus vénérée dans l’hindouisme.
Le défilé
Vers 11 heures les chars, qui sont partis du plus grand temple hindou de France qui se trouve à quelques rues, arrivent dans le quartier. Alors là les amis c’est impressionnant car soudain la foule investit les petites rues de little India et on a du mal à progresser.
Danseurs portant des plumes de paon, joueurs de flutes et de tambours, tireurs de chars, le cortège est stratosphérique et on ne s’attend pas du tout à tomber là-dessus en plein Paris.
C’est au cœur du quartier que la foule est la plus dense, on marche à touche-touche, et même par moment on ne progresse plus du tout. Beaucoup de curieux comme moi se sont mêlés à la communauté indienne, et pour les passionnés de photos équipés d’appareils de compétition c’est le bonheur absolu.
La Pause
La plupart des restaurants ont sorti des tables sur le trottoir, et vu la foule c’est soit un menu agneau, soit un menu végétarien. On peut ajouter le fameux naan qui pour moi est indispensable, je dirais même que dans les restos indiens je choisis d’abord le naan, puis le plat qui l’accompagne.
Nous avons opté pour le restaurant Dishny, et malgré l’affluence nous avons été super bien reçus. J’ajoute au menu un cocktail Ganesh à base de Gin et de sirop de rose, idéal pour calmer tout léger début d’agoraphobie.
Les noix de Coco
Les noix de coco occupent une grande place dans cette fête de Ganesh. Dans l’Hindouisme la coquille symbolise l’illusion du monde, sa chair le fameux karma, et son eau l’égo de l’homme.
Au passage des chars, les fidèles cassent les noix de coco pour briser l’illusion du monde, se libérer de leur égo, et offrir leur cœur à Ganesh.
Le temps de déjeuner, les chars ont fait demi-tour et repartent pour le temple. Une dernière pause au niveau du métro Chapelle histoire de récupérer et c’est reparti. La foule est moins pressante, la procession touche à sa fin.
Les participants commencent à rentrer, tout le quartier autour de Chapelle se couvre des couleurs des saris.
Et voilà les amis pour cette escapade mystique dans le quartier indien de Paris, j’espère que vous avez un peu voyagé avec nous, et l’été prochain n’hésitez pas à aller assister à cette célébration colorée à Little India.
Je finirai par une pensée pour nos amis Marocains qui ont été durement frappés ce week-end.
Bonne soirée
N.